L’Evangile du dimanche 24 juin 2007

Dernière modification écrite le vendredi 4 avril 2008

Luc 1, 57-66.80

Le temps où Élisabeth devait accoucher arriva, et elle enfanta un fils. Ses voisins et ses parents apprirent que le Seigneur avait manifesté envers elle sa miséricorde, et se réjouirent avec elle. Le huitième jour, ils vinrent circoncire le petit enfant, et ils l’appelaient Zacharie, du nom de son père. Mais sa mère prit la parole et dit : Non, il sera appelé Jean. Ils lui dirent : Il n’y a dans ta parenté personne qui soit appelé de ce nom. Et ils faisaient des signes à son père pour savoir comment il voulait l’appeler. Zacharie demanda une tablette et il écrivit : Jean est son nom. Et tous furent dans l’étonnement. Au même instant, sa bouche s’ouvrit et sa langue se délia ; il parlait et bénissait Dieu. La crainte saisit tous les habitants d’alentour, et, dans toutes les montagnes de la Judée, on s’entretenait de tous ces événements. Tous ceux qui en entendaient parler les prirent à coeur et dirent : Que sera donc ce petit enfant ? En effet la main du Seigneur était avec lui. Or le petit enfant grandissait et se fortifiait en esprit. Il demeurait dans les déserts, jusqu’au jour où il se présenta devant Israël.

Une fois de plus, tout l’Ancien Testa­ment est résumé par l’allusion à la promesse faite à Abraham. Cette promesse se présente comme le mystère caché qui domine toute l’histoire d’Israël. Dieu est resté fidèle à sa parole sans y avoir été obligé ou forcé : par sa libre grâce. C’est pourquoi le nom des représentants de l’Ancien Testament dans le Nouveau a une profonde signification. Le fils de Zacharie (Dieu se souvient) et d’Elisabeth (Dieu a promis) s’appelle Jean (Dieu est grâce). Cela est souligné dans le récit où Jean est appelé par son nom. La joie très particulière de Zacharie se distingue de celle purement humaine que voisins et amis partagent avec lui. Cette distinction apparaîtra souvent dans la vie de Jésus. Sans cesse surgiront les différences entre ceux qui le suivent pour des raisons humaines et ceux qui vont après lui pour avoir reconnu de qui il s’agit. Il révèlera lui-même cette opposition à ses disciples le jour où il les exhorte à ne pas se réjouir des dons exceptionnels conférés à chacun d’eux, mais « de ce que leurs noms sont inscrits dans les cieux » (10, 20). A celui qui ne connaît pas encore cette joie, tout ce qui dépasse la commune mesure des joies terrestres peut apparaître sombre et menaçant. Voilà pourquoi Luc souligne ici comment l’étrange comportement de Zacharie éveille chez tous les voisins et amis la crainte et l’étonnement. Certes, ils connaissent tous les promesses de la venue du Messie. Mais, aussi longtemps que la grâce est cachée à leurs yeux, la venue de Dieu ne saurait être pour eux un sujet de joie ; ils se réfugient dans les joies éphémères. Le mot « crainte » caractérise la vie en dehors de la rédemption : c’est une vie parmi « les ennemis ». Les ennemis, ce sont les puissances qui cherchent à anéantir l’espérance du peuple de Dieu, à briser son alliance avec Dieu et à détruire sa foi ; mais ce sont aussi les ennemis extérieurs tels que les Romains qui ont usurpé la domination sur le peuple de Dieu et Hérode, le roi parjure. Ce sont tous ceux qui, durant la vie terrestre de Jésus, se révéleront les ennemis du Royaume, les Pharisiens, les scribes, les grands­prêtres. Derrière eux se dessine l’ombre des vrais ennemis : ténèbres, mort, inimitié. Les hommes ne sont que des outils entre les mains « des puissances, des régisseurs de ce monde de ténèbres » (Eph 6, 12). Le peuple de Dieu lui-même paraît devoir être leur butin. Mais ce butin leur est arraché au jour de la visite du Seigneur... La prédication doit intervenir pour que le peuple placé devant le fait du salut se laisse entraîné vers sa destinée. C’est ici le champ d’action des prophètes ; Jean sera l’un d’entre eux. Il est le héraut précédant le Roi, comme les lecteurs contemporains pouvaient en voir dans les rues étroites et populeuses des villes orientales, précédant le carrosse ou la litière royale, pressant le peuple par leurs cris et leurs appels afin qu’il se range et se prépare à rendre honneur dans l’humilité à son roi. Mais cette attitude, seul peut la prendre véritablement celui pour lequel la venue du Roi signifie sa propre délivrance. La préparation du chemin est précisément cette invitation à se laisser délivrer par le Roi. En cela la prédication du Précurseur est pleine­ment concordante avec celle des Apôtres. Plus tard, Jean se nommera lui-même « la voix qui crie dans le désert » (3, 4 ; Jn 1, 23). Ainsi sa personne ne doit être en aucun cas objet d’attention. C’est ce qu’il dit qui est important, et non pas ce qu’il est. C’est pourquoi Luc, dans son récit sur le Baptiste, s’oppose à toute velléité de mettre en vedette qui que ce soit dans l’Eglise. Il ne décrit ni le développement ni le caractère de Jean, mais se contente d’une double allusion : l’esprit prophétique s’affermit en lui et sa jeunesse tout entière est déterminée par la préparation de son ministère à venir. Il vit comme un être voué au Seigneur, selon la parole angélique (1, 15) ; dans le désert, c’est-à-dire loin des affaires et des plaisirs humains il s’abstient de toute boisson enivrante ; et dans la dure sobriété du désert aucune tentation humaine ne peut le détourner de l’écoute attentive de la voix de Dieu.

D’après H. Gollwitzer, La joie de Dieu, commentaire de l’Evangile de Luc


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